Prévue à la rentrée universitaire 2011 et finalement reportée en 20121, une carte qui en dit long sur l’évolution de l’université publique.
Dans le cadre du plan UEB C@mpus (doté de 30 millions d’euros) qui regroupe UBO, UBS, Rennes 1, Rennes 2, les grandes écoles publiques de Bretagne, vont fleurir, fac après fac, divers outils numériques imposés relevant au mieux du gadget couteux au pire de l’outil de flicage inquiétant.
Télé-amphis (comme en médecine depuis des années), vidéo-cours en ligne et autres ENT (Espaces Numériques de Travail). Cela soulève des questions de pédagogie et de qualité de l’éducation : déshumanisation des études, de plus en plus apparentées à des produits « on-line », accessibilité des profs, économies sur le dos du personnel et des étudiants…
Mais un point est encore plus sinistre, la mise en place de la fameuse « carte multi-service »2.
Cette carte, de format carte bancaire, avec une puce, sera attribuée à l’ensemble des étudiants et personnels des établissements membres. Elle sert aussi bien de carte d’étudiant que de carte professionnelle et permet d’accéder à un certain nombre de services liés à la vie interne et externe des établissements, de type photocopies, bibliothèques, salles, postes informatiques, achat de tickets restaurant, sous forme de paiement Monéo®… À terme : accès aux transports, bibliothèques, piscine, activités cultuelles… Généralement, la partie Monéo® de cette carte étudiante est gérée par BNP-Paribas (la banque qui balance les sans-papiers…3).
Quels sont les problèmes que cela pose directement ?
Un nouveau système de paiement généralisé à la fac nous est imposé par le haut. Sous couvert de modernité, c’est une nouvelle culture qui s’installe : centralisation de données, obligation d’avoir sa carte sur soi pour accéder à un tas de choses (Restaurant Universitaire, Bibiliothèque Universitaire, photocop’). On note au passage que ce système exclura les précaires non-étudiants qui se payent parfois un repas au RU. La carte étudiante, qui n’était qu’un outil administratif devient aussi un outil de paiement : confusion volontairement entretenue entre un service public (les études) et un produit de consommation. A l’heure de la LRU, de l’université-entreprise et de l’éducation-marchandise, cela interpelle.
Cette carte participe aussi à la vaste campagne de flicage numérique qui touche notre société aujourd’hui. Des puces partout, des caméras, de la biométrie, de la traçabilité sur le net renforcée. Après EDVIGE, LOPPSI 2, HADOPI 1 et 2 vient MONEO®, qui touche cette fois 100% du public concerné (impossible de refuser cette carte). La CNIL, débordée par toutes ces nouveautés, s’est lourdement inquiétée du potentiel de ce type de carte à usage professionnel ou administratif dans son rapport du 16 mai 2008. Il existe un risque de « marquage » abusif et facilité de personnes ayant acheté ou emprunté certains documents, livres (politique, religion, etc.) comme « suspects » dans les fichiers d’employeurs potentiels ou d’un état répressif.
Ce type de carte sera doté à terme d’une puce RFID (Radio Frequency Identification) qui permet le paiement « sans contact » (sans insertion dans un lecteur). Lyon4 et Nice5 (qui va même l’intégrer aux téléphones portables !) semblent être les campus pilotes pour cette deuxième génération de cartes. Ce type de puce qui n’a pas besoin de lecteur pour être détectée et lue à distance comporte d’énormes problèmes de sécurisation de données personnelles : possibilité d’atteinte à la vie privée dans le cas de marqueurs « furtifs » ou accessibles à des systèmes susceptibles de diffuser des informations sur la vie privée. L’identification de personnes par une signature de l’ensemble des étiquettes d’identification par radiofréquences (cartes bancaires, téléphone mobile, pass de transports en commun…) habituellement portées pourrait même être concrètement possible (cf. le brevet d’IBM : Identification and Tracking of Persons Using RFID Tagged Objects).
A l’école, à la fac, refusons le numéFLIC !
Alexis