Motion pour faire face à l’urgence sanitaire et pédagogique

Les per­son­nels du col­lège Thérèse Pierre de Fougères ont trans­mis par la voie hié­rar­chique cette motion. Face à l’ur­gence sani­taire et péda­go­gique, et l’im­mo­bi­lisme de l’ins­ti­tu­tion, les col­lègues veulent évi­ter à tout prix une fer­me­ture défi­ni­tive des éta­blis­se­ments sco­laires, dont on n’a pas fini de mesu­rer les consé­quences sur les élèves. Ils exigent que des mesures urgentes soient prises.


MOTION DES PERSONNELS

DU COLLÈGE THÉRÈSE PIERRE DE FOUGÈRES

« le col­lège désor­mais en pre­mière ligne face au Covid »

ven­dre­di 13 novembre

M. le Dasen,

Les per­son­nels du col­lège Thérèse Pierre n’ont eu de cesse de se réunir durant la semaine de la ren­trée sui­vant les vacances d’au­tomne, et ont fait le constat en Heure d’Information Syndicale ven­dre­di 6 novembre que l’ap­pli­ca­tion du pro­to­cole sani­taire était deve­nue incom­pa­tible avec les condi­tions actuelles d’ac­cueil des élèves. Pour rap­pel, notre col­lège accueille 609 élèves réparti·es en 22 divi­sions, alors que nombre de nos salles de cours sont exi­guës, et que les blocs sani­taires pour les élèves sont inadap­tés et en nombre insuf­fi­sants. Alors que l’é­pi­dé­mie de Covid-19 explose, que les clus­ters dans les éta­blis­se­ments sco­laires n’ont jamais été aus­si nom­breux, et que le pays se recon­fine, les élèves demeurent entre 25 et 30 par classe, des cen­taines dans la cour pen­dant les récréa­tions, et déjeunent au self par dizaines face à face sans masques. Dans ces condi­tions, il est illu­soire de croire que le simple port du masque et le lavage des mains au gel hydro-alcoo­lique peuvent suf­fire à faire bar­rière au virus. Les ser­vices de réani­ma­tion déjà sur­char­gés risquent de satu­rer dans les jours à venir. Il nous semble donc urgent de prendre des mesures immé­diates et fortes, pour évi­ter ou réduire la catas­trophe qui s’an­nonce.

Nous ne vou­lons plus vivre un confi­ne­ment com­plet, comme ce fut le cas au prin­temps, qui a lais­sé des séquelles durables sur nombre de nos élèves tant au niveau sco­laire que social et psy­chique, tout en s’ac­com­pa­gnant d’une charge de tra­vail écra­sante pour les enseignant·es, épui­sante mora­le­ment et phy­si­que­ment, le tout sans aucune recon­nais­sance. Après avoir cher­ché col­lec­ti­ve­ment des réponses satis­fai­santes à appor­ter, nous sommes conscient·es qu’il n’existe pas de solu­tion idéale, et que ce qui pour­ra être fait ne sera que le choix « du moins pire ».
C’est pour­quoi, face à l’ur­gence sani­taire et péda­go­gique, nous exi­geons :

1) une dimi­nu­tion des effec­tifs d’é­lèves pré­sents au col­lège pour per­mettre de limi­ter le bras­sage

Une atten­tion par­ti­cu­lière, dans le cadre d’une nou­velle orga­ni­sa­tion péda­go­gique, devra être por­tée aux enfants qui n’ont pas le même loge­ment d’une semaine sur l’autre. Nous dénon­çons éga­le­ment un pro­to­cole sani­taire aca­dé­mique aber­rant pour nos élèves rele­vant de l’Ulis, qui pro­voque de la peur et de l’in­com­pré­hen­sion chez ces jeunes qui font déjà face à des dif­fi­cul­tés sco­laires, sociales et psy­cho­lo­giques très impor­tantes. Nous récla­mons que ce pro­to­cole soit pure­ment et sim­ple­ment aban­don­né, et que l’on revienne à une orga­ni­sa­tion res­pec­tueuse de leurs besoins.

2) des amé­na­ge­ments de pro­grammes indis­pen­sables et des direc­tives claires et offi­cielles sur ce sujet au niveau natio­nal (notam­ment pour les classes à exa­mens)

En effet, en tant que pro­fes­sion­nels de l’é­du­ca­tion, nous savons très bien que la réduc­tion des effec­tifs ne peut que s’ac­com­pa­gner d’une pré­sence dans l’é­ta­blis­se­ment moins impor­tante pour les élèves, qui ne pour­ront donc pas avoir tous leurs cours en pré­sence d’un·e enseignant·e. Dans ces condi­tions, la pro­gres­sion des élèves ne pour­ra pas être la même qu’en temps ordi­naire. À situa­tion sani­taire excep­tion­nelle, réponse péda­go­gique excep­tion­nelle : les pro­grammes et/​ou les moda­li­tés d’exa­mens doivent être revus et amé­na­gés.

3) l’embauche des per­son­nels indis­pen­sables pour faire face à l’ur­gence sani­taire et péda­go­gique

Nous ne pou­vons conti­nuer à assu­rer nos mis­sions conve­na­ble­ment avec les effec­tifs actuels en classe. C’est de la mal­trai­tance vis-à-vis de nos élèves les plus fra­giles. Nous avions déjà tiré la son­nette d’a­larme en sep­tembre sur la ques­tion des élèves à pro­fil par­ti­cu­lier dans notre col­lège : le contexte actuel ne fait qu’ac­croître ce constat. Certain·es de nos élèves ne sont tou­jours pas suf­fi­sam­ment accompagné·es par des AESH, et nous n’a­vons tou­jours pas d’enseignant·e référent·e nom­mé sur le poste. Depuis la ren­trée, la vie sco­laire fait face éga­le­ment à des dif­fi­cul­tés impor­tantes dans la ges­tion des élèves, notam­ment sur la pause méri­dienne du fait d’un manque de per­son­nel per­met­tant un enca­dre­ment opti­mal. Par ailleurs, une baisse des effec­tifs en classe ne peut s’ac­com­pa­gner que de recru­te­ments mas­sifs d’enseignant·es : qui peut croire qu’on fait le même tra­vail à 30, 25, ou 20 élèves par classe ? Les effets béné­fiques de la baisse des effec­tifs ont été démon­trés par de nom­breuses études. Enfin, un pro­to­cole sani­taire ren­for­cé s’ac­com­pagne for­cé­ment d’une charge de tra­vail accrue pour les per­son­nels de ser­vice, il est donc néces­saire d’an­ti­ci­per de nou­velles embauches à ce niveau éga­le­ment.

Par ailleurs, nous refu­sons tout accrois­se­ment de notre charge de tra­vail. Nous sommes déjà épuisé·es alors que nous venons de ren­trer des vacances d’au­tomne. Traditionnellement, la période qui pré­cède les vacances d’hi­ver est une des plus dif­fi­ciles à tra­ver­ser, ce qui n’est pas pour nous ras­su­rer dans le contexte actuel. Ainsi, il est par exemple hors de ques­tion pour nous de devoir assu­rer à la fois un ensei­gne­ment à dis­tance et en pré­sen­tiel si cela devait se mettre en place. Physiquement et mora­le­ment, nous savons que nous ne pour­rons pas tenir. Il faut donc qu’un dis­cours clair soit tenu par l’ins­ti­tu­tion sur « la classe à la mai­son » : oui à des acti­vi­tés de culture géné­rale (lec­ture de romans, vision­nage de docu­men­taires, écoute de musiques, visites vir­tuelles de musées, etc…), non à l’illu­sion d’une « conti­nui­té péda­go­gique » qui n’est que men­songe à des­ti­na­tion des parents et des élèves et sur­croît de tra­vail pour les enseignant·es.

Les déci­sions doivent être rapides. Des mesures doivent être prises dès que pos­sible car nous vou­lons évi­ter à tout prix une fer­me­ture du col­lège à nos élèves, qui aurait des réper­cus­sions catas­tro­phiques pour bon nombre d’entre eux. Entendons-nous bien : ce que nous sou­hai­tons évi­ter à tout prix, c’est le confi­ne­ment péda­go­gique vécu au prin­temps.

Enfin, il nous semble impor­tant éga­le­ment que la mise en place d’un nou­veau pro­to­cole et de nou­velles mesures de pro­tec­tion soit concer­tée avec les autres éta­blis­se­ments de la ville et du bas­sin, car nombre de nos col­lègues tra­vaillent dans d’autres col­lèges, et des mesures dif­fé­rentes com­pliquent for­te­ment leur tra­vail.

Dans l’im­mé­diat, nous deman­dons à ce que du temps de concer­ta­tion soit déga­gé pour l’en­semble de l’é­quipe afin de mettre en place un pro­to­cole qui cor­res­ponde à la fois à nos capa­ci­tés et aux besoins de nos élèves. Nous avons besoin du temps de pré­pa­ra­tion qui a cruel­le­ment man­qué au prin­temps der­nier. Cela pour­rait par exemple pas­ser par deux demi-jour­nées bana­li­sées, qui per­met­traient à la fois de pen­ser à une mise-en-œuvre des allè­ge­ments d’ef­fec­tifs, mais aus­si aux aspects pra­tiques et tech­niques, notam­ment en concer­ta­tion avec les familles.

Les per­son­nels du col­lège

texte sou­te­nu par les orga­ni­sa­tions syn­di­cales du col­lège : Sgen-CFDT, Snep-FSU, Snes-FSU, STE-CNT, Sud Éducation

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