C’était un jour de mobilisation dans le groupe qui m’emploie. Le résultat des négociations salariales ayant été trop médiocre, la plupart des sites français ont été pour l’occasion sujets à des mobilisations sous plusieurs formes (réunions d’informations syndicales, débrayages, manifestations, etc). Sur le site où je travaille, elle a prit la forme d’un rassemblement devant l’accueil de l’entreprise, « dès potron-minet » aurait écrit un correspondant de Ouest-France !
Pour accueillir les troupes, le café est chaud, les biscuits emballés individuellement et la sono nous rappelle que le travail et la mobilisation des travailleurs et travailleuses face aux exploiteurs a fait l’objet de nombreuses chansons.
L’entreprise a plusieurs entrées et pour canaliser les collègues vers le comité d’accueil intersyndical, des rubalises barrent les entrées les plus éloignées. Le directeur général est absent, nous sommes restés discrets et pour une fois il semble que personne ne l’a prévenu. C’est donc des subordonnés, directeur de service ou responsables aux Relations Humaines, qui découvrent notre dispositif. Certains sont débonnaires : l’accès à l’entreprise n’est pas bloqué, la mobilisation est pacifique et les syndicats sont dans leur rôle. D’autres sont « plus royalistes que le Roy » et s’indignent de cette « prise en otage » unilatéralement définie comme illégale.
Tiens, en voilà justement une qui commence à arracher rageusement les rubalises alors que les prises de parole devant les salariés commencent. Rapidement, une délégation va les remettre en place.
Avait-elle le droit d’arracher ces rubalises qui finalement ne bloquaient personne ? Dans quelle mesure la représentante d’un employeur peut-elle décider de faire justice elle-même pour contrer ce qu’elle considère comme un blocage, avec ou sans l’aval de son employeur ? Là, ce n’est que du ruban plastique mais si l’intersyndicale avait décidé de mettre des véhicules à la place des rubalises, aurait-elle eu le droit de les détruire à coup de barre de fer ? Non, parce qu’un employeur n’a pas à faire justice lui-même d’autant plus dans le cadre d’un conflit social puisque son pouvoir disciplinaire ne concerne que l’exercice du contrat de travail. On a pris des photos et on se les garde sous le coude au cas où il faudrait qu’un tribunal le rappelle.
PS : Et si vous vous demandez ce que l’employeur aurait dû faire pour respecter la loi, ne vous en faites pas, il connaît très bien la procédure. D’ailleurs, c’est ce qu’il a fait quelques semaine plus tard contre le pseudo blocage d’un site de la région parisienne.