Le travail dans le secteur sanitaire et social est régi par des conventions collectives qui garantissent les droits des travailleurs. La Branche des Associations du Sanitaire et du Social (BASS) a été formellement créée en 1993 par les organisations patronales et les syndicats de salariés pour faciliter le paritarisme du secteur. Les différentes conventions de cette branche sont attaquées une à une par les syndicats d’employeurs depuis plusieurs années. Que ce soit la convention régissant les établissements accueillant des personnes handicapées ou celles régissant les travailleurs auprès des personnes sans domicile, l’objectif reste le même : réduire le coût du travail.
L’expérience des collègues de l’ADMR1 le montre. La remise en cause de leur convention est déjà en cours et balaye les acquis de longue lutte. Celle des CCLC2 a pris le même chemin.
Depuis 2009, les professionnels de l’action sociale et de la santé travaillant sous le régime des conventions collectives 51 et 66 se sont battus côte à côte pour défendre l’ensemble des conditions qu’elles garantissent. Au-delà de la défense des acquis, des mots d’ordre communs d’amélioration des salaires ont également été portés tant au niveau local que national.
La remise en cause officielle de la convention 51 par le syndicat FEHAP3 et la répression qui a été mise en place lors des manifestations unitaires, notamment à Lyon, doivent nous pousser à rester vigilants et à nous informer sur l’actualité des négociations de chaque convention.
Les conventions collectives du secteurs sanitaires et sociales.
Les dernières années ont vu se produire des changements inattendus, pour ne pas dire inédits, dans le secteur social : les salariés se mobilisent.
Ces mouvements ne sont hélas pas réalisés en vue d’exiger des améliorations mais pour défendre ce qui existe. Pourtant depuis le 1er juillet 2012, des salariés de certaines conventions, du fait du blocage de la révision du point d’indice, se trouvent embauchés sur une base se situant en dessous du SMIC. Ce fait aberrant découle d’un blocage de fond entre « instances (dites) représentatives du personnel » et représentants des employeurs.
Je vais m’attacher à vous retracer l’historique de ces conventions, rassemblées sous le terme de Convention BASS, faire un petit point sur les mobilisations qui ont eu lieu depuis maintenant quatre ans, pour terminer sur les perspectives de l’année à venir…
Le secteur sanitaire et social a une longue histoire. Elle est composée de l’histoire des hôpitaux, établissements privés pour accueillir « les pauvres, les mendiants et invalides natifs des lieux, comme aussi les enfants orphelins ou nés de parents mendiants »,4 créés et gérés par des associations, des œuvres ou des fondations.
Globalement deux courants vont se croiser : celui des congrégations religieuses, qui vont créer de nombreux établissements de soins bénéficiant de la faiblesse du dispositif public, et celui du mutualisme qui se développe en Europe entre les deux guerres, en lien avec le syndicalisme et la construction des droits sociaux pour les travailleurs. Ce dernier courant souhaite lutter contre les inégalités produites par le capitalisme, ce que l’État est incapable de faire. Ainsi en 1864, la Croix-Rouge Française est créée et deviendra association loi 1901. La FEHAP5 est créée quant à elle, en 1936. Elle fédère des associations, des congrégations, des organismes mutualistes et des fondations gérant des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux non lucratifs.
Mais ce n’est qu’après la deuxième guerre mondiale que le secteur va d’abord se structurer puis se professionnaliser, le salariat remplaçant le bénévolat.
Dès l’après-guerre, le secteur va se constituer en tant que tel. Les associations vont très vite se structurer et les établissements seront agréés en 1954. Dès 1945, sont créés les CRLCC6 établissements de santé privés à but non lucratif et de caractère hospitalo-universitaire, participant au service public hospitalier. La même année une ordonnance institue l’UNAF7 et les UDAF8, avec le statut d’association loi de 1901, reconnue d’utilité publique, réunissant exclusivement des personnes morales. L’UNAF9 se voit confier le monopole de la représentation des familles. En 1946 les ARSEA10 se regroupent dans l’Union des Associations Régionales. Les URIOPSS11, qui se regrouperont en Union Nationale Inter-fédérale des Œuvres et Organismes Privés Sanitaires et Sociaux8, voient le jour en 1947. L’année d’après c’est l’UNARSEA12 qui est créée. En 1960 c’est la naissance de l’UNAPEI13.
Cette structuration s’accompagne et se prolonge d’une qualification et donc d’une professionnalisation. L’histoire du secteur devient celle des relations entre les salariés et les employeurs. Les lois sur les conventions collectives librement négociées datant de 1946 et 1950 vont servir de base pour les négociations entre ceux-ci. Des conventions collectives et des accords vont donc être signés entre les nouveaux patrons et les organisations de salariés (syndicats ou pas), ces conventions ayant des champs d’application qui se recoupent. En 1951 la FEHAP14 signe la convention collective des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif (appelée CC51). En 1952 La Croix-Rouge signe une convention qui lui est propre. En 1958 après des négociations entamées quatre ans plus tôt l’UNASEA15 et l’ANEJI16 signent un accord calqué sur l’éducation surveillée.
Pour pouvoir négocier ces conventions collectives, les associations d’employeurs vont créer des syndicats. En 1962, l’UNASEA17 va créer le SNASEA18 et l’UNIOPSS19 va créer le SOP20, deux syndicats regroupant des associations. C’est l’échec d’une entente entre le SOP21, le SNASEA22 et la FEHAP23 pour l’intégration de l’ensemble du secteur dans la CC51 qui va engager le SNASEA24 et le SOP25 dans des négociations menant à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées de 1966 (appelée CCN66).
Côté salarié, l’ANEJI26, organisation de professionnels concurrente du syndicalisme, va se créer en 1947. Jusqu’aux années 1960, elle va occuper l’ensemble du terrain professionnel, de la définition du métier jusqu’à des négociations aboutissant à la signature d’accords collectifs de travail. Mais n’étant pas un syndicat elle ne pourra pas signer de convention collective. Dès le début des années 50, de façon lente et progressive, vont se constituer des sections syndicales puis des syndicats régionaux et nationaux, affiliés à des confédérations ou autonomes. Trois courants dominent alors la syndicalisation : le développement de la CGT par des salariés anciens ouvriers ou d’origine ouvrière, la constitution du SAPEEI27 (qui rejoindra la CGT-FO en créant sa fédération santé social) et l’existence de quelques sections affiliées à la CFTC puis CFDT.
Au début des années 70 et jusqu’en 1975 vont avoir lieu des négociations d’harmonisation dans le but de créer une convention collective unique, avec la signature de plusieurs textes communs (droit syndical, délégués du personnel et CE, conditions de recrutement de licenciement, exécution du contrat de travail). Une rupture va se produire et provoquer l’échec de ces négociations, avec la demande d’étendre les congés supplémentaires de la CCN66 aux autres conventions.
Toutefois c’est en 1972 que PROMOFAF, organisme de formation qui deviendra UNIFAF, va être créé par une convention signée par trois syndicats employeurs (FEHAP28, SNASEA29, SNAPEI30) et les cinq organisations syndicales représentatives de salariés. La loi de 1975 promulgue l’agrément des accords par le ministère des affaires sociales ce qui va modifier la façon de négocier. De 1975 à 1993, les différentes conventions vont être aménagées, souvent à la baisse sous la pression de la crise et des difficultés financières. En 1993, face au danger encouru par les établissements les cinq syndicats patronaux du secteur (la FEHAP31, la FNCLCC32 1ère Présidence, le SNASEA33 ; la FEGAPEI34 et le SOP35) vont s’unir et créer l’UNIFED36, afin de pouvoir signer des accords de branche. Ils seront rejoints par la Croix-Rouge en 1997. L’UNAF37 rejoindra l’UNIFED38 en 2000 avant d’adhérer au SNASEA39.
Au cours des années 90 et 2000 les commissions et organismes paritaires vont se mettre en place. Plus de quarante accords ont été signés depuis 1996 entre l’UNIFED40 et les cinq confédérations de salariés. En 1999 la loi des 35h est l’occasion pour les patrons de déclencher de nouvelles négociations… A partir de 2001, l’UNIFED41 va s’associer avec l’USGERES42 et le GEMA43 pour s’organiser au niveau du secteur de l’économie solidaire.
Va-t-on vers une mobilisation unitaire ? Les syndicats dits « représentatifs » des salariés ont commencé à parler d’une seule voix. Pour la première fois ils ont dits non ensemble aux propositions inadmissibles formulées par les syndicats d’employeurs.
Le 28 août 2012, les négociations paritaires dans la CC51 ont pris fin. Toutes les organisations syndicales des salariés présentes à la table des négociations ont rejeté les propositions patronales. La FEHAP44 est maintenant seule pour décider de l’avenir des salariés de cette convention. Elle a rompu unilatéralement les discussions, sans attendre leur terme prévu au 1er décembre 2012. Le risque est aujourd’hui de voir apparaître une recommandation patronale qui se substituerait à l’actuelle CC51, si le ministère lui donne son agrément. Après une caricature de négociations, les patrons de la FEHAP45 n’ont obtenu aucune signature des syndicats de salariés malgré les pressions. Ils ont fixé de façon unilatérale le terme de la négociation au 3 septembre 2012, et décidé de proposer une recommandation patronale à la commission d’agrément du ministère. Ce texte n’a pas été communiqué aux organisations syndicales des salariés.
L’accord patronal portera sur l’ensemble des points suivants :
- Le déroulement de carrière : nouveau barème créant des économies à court terme pour les employeurs.
- La majoration spécifique des cadres : passage d’échelon plus rapide pour ceux qui répondront le mieux aux exigences de leur hiérarchie.
- La reprise de l’ancienneté : c’était 100{081db73569529f03096b4b085960e98f7e705f5c7932bc52f24c4d822157cde2} quand quelqu’un arrivait dans un établissement et avait déjà exercé ailleurs dans un établissement régit par la CC51. La recommandation patronale est de 30{081db73569529f03096b4b085960e98f7e705f5c7932bc52f24c4d822157cde2}, encore une belle économie.
- La promotion professionnelle : un salarié promu accédait au coefficient de base du nouveau métier, mais gardait sa prime d’ancienneté. Demain la prime d’ancienneté repartira de zéro.
- La récupération des jours fériés : les fériés travaillés ou tombant sur un jour de repos étaient récupérés. Demain les fériés sur un temps de repos ne le seront plus.
- Les allocations de départ à la retraite : aujourd’hui c’est 6 mois de salaire pour 25 ans d’ancienneté. Dans deux ans il faudra 35 ans d’ancienneté pour accéder à la même prime. Un nouvel échelon hypothétique de 40 ans d’ancienneté serait créé mais ne sera jamais atteint : personne ne peux prétendre tenir 40 ans sur une même structure.
- Indemnités de licenciement : suppression de l’article qui permettait aux cadres et non cadres de bénéficier d’indemnités plus favorables que celles prévues par le droit du travail, encore une économie à court terme…
- Le paiement des remplacements : le remplacement d’un salarié plus qualifié amenait un traitement indemnitaire fonction de l’ancienneté. Je remplace un collègue plus qualifié : je touche une rémunération qui équivaut à sa qualification, mais aussi fonction de mon ancienneté. Demain cette règle disparaîtra.
- Les attributions des délégués du personnel : les délégués du personnel étaient informés des licenciements pour motif disciplinaire avant l’exécution de la décision. Ce ne sera plus le cas. Or on le sait, rien de plus simple que de trouver une faute grave pour un employeur lorsqu’il cherche à se débarrasser d’un salarié gênant.
- La procédure disciplinaire : L’article de la CC51 (art05.03.2) couvrait les salariés des licenciements rapides et injustes. Sauf en cas de faute grave, aucun licenciement ne pouvait être envisagé sans qu’il y ait eu au moins deux sanctions. Le retour au Code du Travail supprime cet article. Cela entraîne le fait que les salariés ne pourront plus se faire accompagner pour un entretien disciplinaire, sauf en cas de licenciement.
- L’information des délégués syndicaux en cas de licenciement pour motif économique : suppression encore une fois de cet article. Un bon moyen de contourner les syndicats dans une période où la pression sur les finances des associations est de plus en plus forte de la part des Agences Régionales de Santé46.
- Le calcul des heures supplémentaires : certains salariés bénéficiaient d’heures supplémentaires à 100{081db73569529f03096b4b085960e98f7e705f5c7932bc52f24c4d822157cde2} la nuit, les dimanches et jour fériés. Les patrons tirent vers le droit du travail classique : 25{081db73569529f03096b4b085960e98f7e705f5c7932bc52f24c4d822157cde2} de la 71ème heure à la 86ème heure et 50{081db73569529f03096b4b085960e98f7e705f5c7932bc52f24c4d822157cde2} au-delà de la 86ème heure. Ceci entraîne une perte de revenu importante pour ces salariés, qui bénéficiaient d’une mesure compensatrice de leur condition de travail.
- Les collèges électoraux : des métiers non cadres étaient classés dans le collège cadre et augmentaient donc la représentativité de ce collège. Ce ne sera plus le cas. Encore une fois il s’agit là de travailler un écart entre équipe de management et employé de terrain.
- La prime décentralisée : cette prime sera soumise aux accords d’entreprise. Si le rapport de force n’est pas en faveur des salariés, le calcul restera le même que précédemment.
- L’intégration des nouveaux métiers : ce point n’a finalement pas été mis en révision et est donc reporté…
Même si le bilan sur la proposition patronale FEHAP47 est quelque peu difficile a saisir, une seule logique se détache. Les établissements régis par la CC51 sont aujourd’hui financés par les Agences Régionales de Santé48. Le diktat de la Révision Générale de la Politique Publique (RGPP) est passé par là, suivie de près par la loi Bachelot – Hôpital, Patient Santé Territoire (HPST). Il faut faire des économies. Les syndicats d’employeurs en bons soldats répondent aux ordres. Ils attaquent de front les acquis des salariés.
La position de la CNT Santé-social, une position construite avec les syndiqués et les non syndiqués
Pour celles et ceux qui doutaient encore de la nécessité de lutter contre les attaques du patronat, la journée de mobilisation du 6 octobre 2011 à Lyon fait office de violent retour à la réalité. En effet, trois salariées ont été grièvement blessées. La raison : des violences policières absolument injustifiées commandées par les patrons de la FEHAP49, totalement sourds face aux revendications légitimes des salariés.
Lors de ces journées, Mme Nora Berra, Secrétaire d’État à la Santé, était conviée à venir prononcer un discours. Son « émotion » se traduit par une unique phrase : « Je souhaite avant de commencer témoigner de ma tristesse et mon émotion pour les trois personnes victimes de l’accident grave qui s’est déroulé hier pendant la manifestation. »50
S’en suivent douze pages de blabla économico-financier totalement creux, sans aucune orientation politique claire en faveur du secteur. Pour exemple : « Les ressources financières publiques en matière de santé et plus globalement de protection sociale ne sont pas sans limites, d’autant que la conjoncture économique actuelle nous oblige à optimiser les moyens existants. »51 Notons également que des mots comme « salariés » ou « conditions de travail » ne sont pas prononcés une seule fois.
Tout est dit. Pour le patronat et l’État, l’heure est à « l’optimisation » ! Refusons la fatalité et dénonçons les pratiques capitalistes et sécuritaires appliquées au secteur. Aujourd’hui, après la dénonciation de la CC51, les syndicats employeurs semblent s’apprêter à dénoncer la CCN6652. En effet, le 7 décembre est la date limite pour le cadre de la révision de la CCN66 fixée par les syndicats patronaux (FEGAPEI53 et SYNEAS54). Le SYNEAS55 revendique « l’exclusivité d’un projet structuré autour d’une logique d’ensemble »56, une manière claire de dire que ne sont valables que les seules propositions patronales, faisant fi des revendications des salariés !
La stratégie de la FEGAPEI57, quant à elle, est de signifier le 7 décembre l’échec des négociations et donc de se diriger tout droit vers la dénonciation de la convention. Position que le SYNEAS58 ne manquera pas d’approuver ! Voilà un bel exemple de « solidarité patronale » et de « travail d’équipe » dans un seul but : détruire les acquis sociaux durement obtenus depuis les années 60 des 570 000 salariés du sanitaire, du médico-social et du social.
12 propositions concrètes pour une lutte salariale victorieuse !
- Salaire minimum conventionnel de 1500 euros nets.
- Revalorisation des indices d’entrée et rattrapage du pouvoir d’achat.
- Intégration de l’IRTT (Indemnité de la Réduction du Temps de Travail) et intégration de toutes les primes au salaire.
- Progression de carrière égale à 20 points d’ancienneté tous les 2 ans pendant 36 ans.
- Les écarts entre les hauts et les bas salaires doivent être ramenés de 5 à 3.
- Pas de part variable qui introduirait le salaire au mérite.
- Grille unique de salaire applicable à tous les salariés, y compris les cadres.
- Âge du départ à la retraite volontaire à 60 ans avec le versement d’une indemnité de départ à hauteur des 6 derniers mois.
- Réduction du temps de travail, sans perte de salaire.
- Refus de la précarisation de l’emploi, avec, l’embauche en CDI des nombreux personnels en CDD en place dans tous les établissements.
- Ancienneté reprise quelque soit le secteur d’activité pour les salariés ayant les diplômes ou la qualification.
- Maintien et élargissement des congés trimestriaux.
Ces revendications ne sont pas figées. Elles ont été construites en concertation avec l’ensemble de la fédération CNT Santé-social. Cette base, loin d’être utopique et éloignée des besoins de terrain doit être portée par le plus grand nombre.
Rappelons que le travail sanitaire et social, et donc les conventions collectives, ont un financement public (par les subventions versées aux différentes associations notamment). Défendre les conventions va donc de paire avec la défense du service public, la protection et le maintien de la sécurité sociale, sans se leurrer sur un hypothétique engagement de l’État politique pour aller chercher l’argent là où il se trouve !
Il y a ici deux logiques qui s’affrontent, basées sur des intérêts de classes opposés. Les employeurs du secteur sanitaire et social en s’alignant sur la logique libérale, gestionnaire, managériale, révèlent leur appartenance à une classe sociale dominante. Elle s’oppose à la fois aux intérêts des travailleurs et à une certaine conception de l’action sanitaire et sociale. Ils mettent fin ainsi à l’illusion, au leurre que le travail social est seulement basé sur un intérêt commun à tous avec des valeurs humanistes. Ils montrent clairement que c’est un moyen pour la classe sociale dominante d’obtenir la paix sociale par le contrôle.
De leur côté, et malgré une histoire chaotique, les fédérations de syndicats d’employeurs tentent d’accorder leurs violons afin d’écrire une convention unique qui n’en doutont pas sera au rabais. Les pistes avancées dans la proposition du SYNEAS59 pour réviser la CCN66 était notamment de mettre en place des délais de carence en cas d’arrêt maladie60, la perte des congés trimestriaux, l’évolution de la grille d’ancienneté entraînant une lourde perte financière sur une carrière entière et creusant encore plus les inégalités entre cadre et non-cadre, travailler sur la mise en place de salaire individualisé en introduisant une part variable a discrétion des supérieurs. Ces attaques s’orientent vers une vision managériale du travail social.
Une étude menée par une déléguée syndicale CGT au sein d’une association rennaise montre l’appauvrissement globale des salariés. Un salarié peut actuellement commencer sa carrière en CCN66 en dessous du SMIC. Le blocage du point d’indice depuis 2010, sa faible évolution depuis 2008, entraînent une réelle pauvreté des salariés ayant de faibles qualifications. Les associations compensent actuellement sur leur fond propre cette situation d’illégalité sans toujours avoir les moyens versés par leurs financeurs.
Et la convention collective 66, où en sommes-nous ? Après l’échec des négociations sur le dernier projet patronal porté par le syndicat employeur SYNEAS61, les négociations se sont arrêtées. La FEGAPEI62, autre organisation patronale, indique clairement vouloir travailler dans le cadre d’une convention collective unifiée.
N’en doutons pas : si la dénonciation de la CC51 est effective et validée par l’État au 2 décembre 2012, cette proposition qui est celle d’un seul syndicat d’employeur, les patrons des autres conventions de la Branche des Associations Sanitaires et Sociales (BASS) n’hésiteront plus à porter la même estocade.
Déjà dans l’ensemble de la branche, les accords locaux, les accords RTT sont systématiquement remis en cause, dénoncés par les patrons. Partout on restructure, absorbe, fusionne. Des établissements et des services ferment, avec leurs lôts de licenciements, de dégradation des conditions de travail. À cela il faut ajouter le blocage des salaires et des salaires minimum conventionnels, rattrapés et dépassés par le SMIC pour certaines catégories.
Les employeurs poursuivent leurs attaques sur les conventions en créant et rémunérant des catégories de travailleurs en dessous des grilles minimum conventionnelles, en déqualifiant des emplois, en favorisant la compétition et la concurrence entre les salariés, en généralisant les entretiens individuels qui favoriseront à terme la mise en place du salaire individualisé.
En effet, en prenant la décision unilatérale de mettre fin aux négociations et de recourir à une « recommandation patronale », la FEHAP63 a ouvert une brèche, dans laquelle risquent de s’engouffrer les autres chambres patronales de la BASS, qui s’inscrivent dans la logique de démantèlement des conventions du secteur et en particulier ceux de la CCN66.
On le voit, les patrons, eux, se rapprochent et travaillent sur des positions communes qui vont semble-t-il vers une convention unique. Dans toute la branche les conditions de travail de dégradent. Que l’on soit dans le sanitaire, le médico-social ou le social, les charges de travail augmentent, l’intensité aussi. Les personnes accueillies se transforment en « clients ». La logique de moyens qui prévalait jusque là cède la place à une logique de résultats.
La lutte engagée par la CNT veut rassembler au-delà des étiquettes : il nous faut construire un rapport de force important dans l’unité.
En nous organisant, en nous rassemblant, alors nous pourrons imposer nos choix contre ceux des employeurs et des politiques. Nous pouvons faire évoluer nos acquis qui sont des droits et non des privilèges !
Ne cédons pas au chantage ! Pas de culpabilisation face à la grève et/ou aux actions que nous déciderons de mener. Nous sommes des professionnels salariés. Ne croyons pas qu’il est dans l’intérêt de notre fonction et des personnes que nous accueillons de se sacrifier au non d’un sacerdoce.
Bien au contraire, défendre nos conditions de travail c’est défendre la qualité de notre accompagnement.
Manu & CNT Santé-Social 6964