Appel pour diffamation contre la PAF.
Plainte du ministère de l’Intérieur
contre le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes (suite)
Le mardi 10 novembre 2009 à 14 heures,
le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes
passe en procès devant la Cour d’appel de Rennes.
NOUVEL APPEL À SOLIDARITE ET À MOBILISATION !
En juin 2008, nous, collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes, avons appris par voie de presse qu’une plainte avait été déposée contre nous par le Ministère de l’Intérieur suite à la diffusion de 3 tracts et de 2 affiches. Ces écrits accompagnaient deux rassemblements contre la Police aux Frontières (PAF) le 2 avril 2008 [voir encadré pour le contexte de cette mobilisation].
Une bonne dizaine d’arguments utilisés et d’expressions employées ont été isolées pour nous accuser de propos diffamants et injurieux à l’encontre de la PAF. Durant l’enquête préliminaire, 8 personnes ont été auditionnées, dont 3 seulement avaient effectivement participé aux rassemblements du 2 avril. Plus grave : en dépit de notre présentation collective au commissariat, la police a refusé d’interroger la cinquantaine de personnes qui avaient participé à ces rassemblements. Elle a plutôt tenté de faire dénoncer quelques personnes parmi les autres.
En juin et juillet 2008, suite à un premier appel à solidarité et à mobilisation, le fond et la forme de l’enquête préliminaire avaient suscité bien des réactions publiques et médiatisées (individus, associations, avocat-e‑s, élu-e‑s, syndicats, partis…). En particulier, les pressions policières subies par la Maison Internationale de Rennes (MIR) – association indépendante qui héberge nos assemblées générales hebdomadaires – pour l’obliger à livrer les noms des « animateurs » du collectif avaient beaucoup choqué.
Fin juillet 2008, le Procureur de la République décide de faire comparaître trois membres de notre collectif, choisi-e‑s et désigné-e‑s arbitrairement, devant le Tribunal correctionnel de Rennes. Le procès a lieu le 12 décembre 2008.
Pour dénoncer le caractère arbitraire des poursuites, lors du procès, une bonne trentaine de personnes se présentent collectivement à l’audience en tant que comparant-e‑s volontaires. Cette présentation collective n’est pas validée par le Juge. Cependant, celui-ci prononce la relaxe. Au nom de la liberté d’expression, nos écrits ne sont pas réprimés.
En effet, selon le Juge, si nos écrits « portent incontestablement atteinte à l’honneur ou à la considération de la police aux frontières », ils ne sont ni injurieux ni diffamatoires. D’abord, « la liberté d’expression […] vaut […] aussi pour [les idées et informations] qui heurtent, choquent ou inquiètent l’Etat […] ». Ensuite, « aucun agent de la police de l’air aux frontières n’est visé de façon nominative ». Enfin, et surtout, « le ton employé […] doit […] être replacé dans le contexte d’une lutte militante. Il est l’expression d’un langage partisan adopté par les militants de la cause de la défense des étrangers lors d’une manifestation publique, ce que ne peuvent ignorer les lecteurs de ces écrits, et ne dépasse pas les limites de la liberté d’expression […]. ».
Seulement voilà : le Procureur de la République a décidé de faire appel.
Autrement dit, les trois personnes du collectif comparaîtront à nouveau le mardi 10 novembre à 14 heures à la Cour d’appel (Parlement de Bretagne). Nous avons décidé d’en profiter pour faire appel nous aussi au niveau de la procédure de comparution volontaire et nous nous présenterons à nouveau collectivement lors de l’audience.
Comme en 2008, nous souhaitons lancer un nouvel appel à solidarité et à mobilisation car nous pensons que, au-delà de la mise en cause du collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes, c’est une certaine forme de liberté d’expression et d’opinion contre la politique d’immigration qui est en jeu dans ce procès.
RASSEMBLEMENTS DE SOLIDARITÉ
SAMEDI 7 NOVEMBRE À 15 h
Place de la mairie à Rennes
MARDI 10 NOVEMBRE À PARTIR DE 13 h 30
devant le Parlement de Bretagne à Rennes
Depuis sa naissance en 2002, le collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes a été souvent sollicité par des personnes étrangères dénonçant les pratiques de la Police aux Frontières (PAF), ce service particulier de la police chargé de lutter contre l’immigration dite irrégulière. Ainsi, à de multiples reprises, de manière médiatisée ou non, notre collectif a jugé important de dénoncer les modes d’arrestations d’étranger-e‑s à domicile, les interpellations devant les écoles des parents sans-papiers, le menottage systématique des étranger-e‑s interpellé-e‑s, les arrestations d’étranger-e‑s aux guichets des préfectures ou devant les locaux associatifs, l’irruption de policiers dans les procédures de mariages mixtes… Les tracts et les affiches visés par la plainte dénonçaient à nouveau ces pratiques, comme le font des centaines d’organisations et de collectifs.
Mais, début 2008, notre collectif a été de plus en plus sollicité par des personnes étrangères, de nationalités diverses, se déclarant victimes de contrôles d’identité fondés sur la couleur de peau ou sur la langue utilisée, en particulier dans les gares ou le métro. Ces contrôles étaient aussi rapportés par des témoins. Dans la quasi-totalité des cas, les personnes contrôlées étaient considérées – dans notre société – comme des personnes « arabes » ou « noires ».
Nous pensons notamment à 7 élèves d’un lycée rennais revenant d’une sortie scolaire qui, le même jour en mars 2008, ont subi ces contrôles d’identité. Cet épisode – qui a débouché sur une interpellation et une tentative préfectorale d’éloignement du territoire – a constitué une goutte d’eau de trop dans l’océan des contrôles d’identité que beaucoup nomment « au faciès ».
C’est pourquoi notre collectif a décidé d’organiser, le 2 avril 2008, une action de dénonciation publique des pratiques de la PAF. Cette action a été annoncée et rendue visible par les 3 tracts et les 2 affiches visés par les poursuites du Procureur. Ces écrits, conformément aux principes de fonctionnement du collectif, avaient été élaborés et validés collectivement en assemblée générale.
Le ton humoristique et ironique, relativement habituel dans l’histoire de notre collectif, semble être au cœur du procès dont nous faisons l’objet. Tout en réaffirmant que notre collectif n’entend pas – comme toujours depuis 2002 – pointer du doigt les individus travaillant à la PAF mais les pratiques et l’existence même de ce « corps constitué de l’Etat », nous craignons que les formes de notre liberté d’expression et d’opinion contre les politiques d’immigration française soient le principal objet des poursuites du ministère de l’Intérieur. Et nous déplorons que ces formes de liberté soient davantage combattues, par le pouvoir actuel, que les effets de la « dérive sécuritaire » qui structure les pratiques policières.
Collectif de soutien aux personnes sans-papiers de Rennes
Assemblée générale ouverte à toutes et tous chaque mardi à 18 hs 30 à la MIR, 7 quai Chateaubriand.
Affiche C.N.T
Français ou immigrés : même patron même combat